Mon étoile

Mon étoile
Ophélie

mardi 7 juin 2011

Vous voulez vraiment savoir ?

Tout débute habituellement par un regard...puis un sourire...encore un regard et l'inconnu s'approche lentement.  Évidemment, puisqu'un bébé semble être un bien public, la majorité des gens se permettent de donner leur avis : "vous avez un beau bébé", "des belles grosses joues", "il profite votre bébé ", "en tout cas on peut dire qu'il est en santé", "moi aussi mon petit-fils est rond", "vous allez voir quand il va se mettre à marcher il va perdre son gras de bébé"....et j'en passe.  Pouvez-vous m'expliquer pourquoi, quand un bébé est potelé, les gens s'imagine que c'est un garçon...même si elle porte une belle robe rose ? Je revendique le droit pour les bébé-filles de porter le bourlet !
"Je ne suis pas grosse, seulement légèrement enveloppée"
 Quand la personne n’insiste pas je me contente habituellement de sourire et de poursuivre mon chemin avec quelques petits pincements au cœur.

Dans le fond les gens sont simplement gentils, et font exactement ce que j'ai souvent fait en croisant un bébé.  On fait un commentaire gentil, on complimente la mère, on porte un intérêt...jamais on ne peut imaginer la suite de l'histoire.  Trop souvent je me vois dans le regard des autres.  Je me vois AVANT Ophélie, assise à la place de l'inconnue.  Je sais que derrière chaque personne, chaque regard, se cache une histoire, heureuse ou difficile, que la personne désire ou non partager...selon l'humeur de l'instant.  Lors de ces instants, il n'est donc pas nécessaire de pousser trop loin notre curiosité pour ce petit bébé, aussi mignon soit-il.

Parfois (souvent) la personne ne désire pas s'arrêter a un simple commentaire...si Ophélie fait dodo, il reste une chance de s'en sortir...mais si elle se réveille alors tout ne fait que commencer.  Après une tentative infructueuse de la faire sourire, ou simplement parce que c'est la question que tout le monde pose en voyant un bébé (moi la première), on demande:

<inconnu>  "elle a quel âge?" 
<moi> " 10 mois"

(l'inconnu regarde alors Ophélie avec un point d'interrogation dans les yeux...ce regard que je n'aime pas que les gens posent sur ma petite fille.  Avec la majorité des gens, d'avoir posé cette question est un point de non-retour...si la personne n'est pas retournée à sa vie dans les 30 secondes, je me dois de poursuivre...)

<moi, en caressant le joue d'Ophélie> " elle a 10 mois mais elle est comme un petit bébé de 1 mois

(...encore une fois c'est l'occasion rêvée pour la personne de sourire, répéter qu'elle est belle et repartir...mais certaines personnes continuent, parfois sincèrement intéressées et parfois avec une curiosité bien malsaine)

<inconnu> qu'est-ce qu'elle a ?
<moi> Ophélie a une maladie.  C'est une maladie génétique encore inconnue qui affecte gravement son cerveau.  

(qu'on ne me dise pas que je ne lui ais pas donné la chance de s'enfuir...parfois ça s'arrête et parfois on continu.  Ce n'est pas toujours les mêmes mots, mais on en revient toujours sensiblement au même.)

<inconnu> oh...pauvre elle...elle est tellement belle...on dirait une poupée...je suis sur qu'elle va guérir.
<moi, avec le sourire> en fait elle ne peut pas guérir.  Les cellules du cerveau ne se régénèrent pas.  Ophélie a une courte espérance de vie.  Elle ne pourra surement pas survivre à sa propre croissance en raison de l'état grave de son cerveau  (je m'empresse de poursuivre, parfois même en m’excusant d'avoir annoncé une telle nouvelle)  Mais en ce moment elle est avec nous et on profite d'elle au maximum.  Elle est entouré d'amour et bla bla bla.

À ce point de la conversation je distingue trois types de personnes:  
Certains ne m'ont plus adressé la parole ou regardé dans les yeux.  La championne étant une serveuse au restaurant qui a répliqué que ces "choses-là elle était pas capable" et est revenue (bien malgré elle) pour nous faire payer...fini les refill de café pour nous.  Si elle ne voulait pas savoir la réponse, il ne fallait pas poser la question. Je peux être tolérante et peut-être que ces gens cachent une histoire difficile, mais je crois sincèrement qu'il y a une façon plus civilisée et respectueuse de réagir.  Je dois avouer que c'est blessant lorsque ce n'est pas un inconnu, mais il parait que c'est normal que certaines personnes s’éloignent.  Une dame de Leucan m'a expliquée qu'il y a même un nom à ce phénomène : le triage naturel.  Comme elle l'a si bien dit : c'est malheureux mais c'est comme ça.    

Le second type de gens sont ceux qui font comme si je n'avais rien dit...la négation totale.  Ils se contentent de parler de guérison et d'avenir...ou ne disent rien du tout sauf qu'elle est belle et ils s'en retourne calmement.  Il est parfois plus rassurant de demeurer dans notre zone de confort.  Je souris et les salue.

Le troisième groupe, heureusement, sont les gens qui assument la réponse à leur question.  Les réactions sont variés, probablement en raison de leur propre histoire, mais peu importe que ce soit des mots maladroits, des larmes, des soupirs, des paroles sages, des exclamations de révolte contre la maladie ou un simple sourire compatissant...je sais que ces personnes viennent de s'imprégner un peu d'Ophélie...et que la majorité vont embrasser leurs enfants, leurs petits-enfants avec une réelle tendresse le soir même.  Je souhaite que, l'espace d'un instant (du moins le temps de terminer l'épicerie), ils réalisent que la vie est précieuse.  J'ai ainsi la sensation qu'Ophélie sème des graines d'amour sur son passage.  Espérons qu'il en résultera des jardins et forets entières d'amour et de vie !

À tous ces gens que j'ai rencontré à l'épicerie, à la pharmacie et partout ailleurs.  À tous ces inconnus qui ont croisé la route d'Ophélie.  À toutes ces personnes qui acceptent de recevoir une réponse lorsqu'ils posent une question, même si ce n'est pas celle attendue, je vous dis "SANTÉ".


11 commentaires:

  1. Est-ce que c'est correct de pleurer à chaque fois que je lis ton blogue Stéphanie... As-t'on le droit de pleurer... Je suis de la 3e catégorie... Un vécu un peu similaire (une certaine compréhension), par interim, avec la leucémie de Luis et une grande révolte...

    Puisque tu ouvres la porte et parce qu'Isabelle m'a souvent dit que le silence ou le ''ignorons la situation et elle n'existera pas'' est pire... Je suis en colère... elle si jolie, elle est là et elle existe... ses beaux petits traits de Fournier... Je ne veux pas qu'elle parte... Au fond de moi je souhaite encore que ce soit une erreure... Mais je sais...

    T'inquiète, elle ne sera pas oublier... Elle existe et elle est là... Moi son visage je ne l'oublierai pas, même si je n'ai pas eut la chance de la serrer contre mon cœur. Depuis le début j'en ai tant envie... je ne sais pas si c'est par égoïsme ou pourquoi j'ai ce désire. Mais je ne le fais pas parce que j'ai peur que de ce que vous pourriez penser... À l'inverse de ceux qui ignore, moi j'ai peur que mon intérêt soit incompris ou mal vu.

    A-t'on le droit de pleurer ou de s'immiscer dans VOTRE (ici je ne sais pas quel mot choisir...) vie... histoire... malheur... peine... vécu... Je ne voudrais vous voler une seule minute...

    Je vous aimes fort et mon Dieu qu'Ophélie à bien choisi ses parents... Vous êtes merveilleux!

    Très sincèrement, Mélanie Fournier xxx

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  2. Avoir un enfant malade ou avec une différence change beaucoup notre regard face aux enfants qui nous entourent. Pour les gens comme la serveuse bien dit toi qu'elle restera petite dans son coeur et dans sa vie mais que toi tu seras grande.

    Mireille xxx

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  3. Merci de partager. Encore une fois tu m'as fait coulé une larme.

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  4. Mon Dieu que ton texte me touche et me rappelle certains souvenirs... parce qu'il était très prématuré, Gabriel avait lair d'un bébé naissant à 2 mois et je me rappelle un homme qui a presque eu un mouvement de recul en apprenant son âge!!

    Mais concentre toi sur l'essentiel, ta belle Ophélie et près de toi et ne t'arrêtes pas aux commentaires des gens ou permets-toi de leur répondre ce que tu penses!! Te connaissant, de toute façon, tu es toujours diplomate!

    j'adore te lire et je pense à toi!

    Marie-Claude xxxx

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  5. Allo!!!

    Je suis une amie d'enfance de David...Votre histoire me touche au plus haut point...Votre belle Ophélie, c'est un cadeau du ciel! Elle vous a choisi comme parents, car elle savait que vous seriez là pour elle! Je vous trouve formidable David et toi d'être si forts, si courageux, si aimants pour vos enfants...

    J'ai deux beaux garçons en santé...mais mon petit Simon, 9 mois à une tache de vin au menton...Quand, il est né, j'ai été très peiné de voir qu'il serait différent des autres enfants...Quand l'envie de pleurer me reprends, je pense à vous...qui auriez sans doute dealé avec une vilaine tâche de vin pour avoir un bébé en santé...Cependant on ne choisi pas, on vit avec et on continu...

    Je vous admire...Continue de nous donner des nouvelles et surtout de mettre des photos de tes enfants qui sont magnifiques...

    Marie-Claude Fournier, xxxx

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  6. Je pense que d'une certaine façon, tu fais grandir les gens qui t'abordent et ne veulent pas entendre tes réponses, plusieurs personnes iraient dans leur sens et ne leur donnerait pas, mais tu fais bien de leur fournir, c'est un grand geste de générosité au fond ;) Lâche pas, ton blog est merveilleux, et merci de partager avec nous, c'est bon de te lire

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  7. Bonjour,

    Je suis arrivée sur votre blog par hasard en visitant d'autres blogs. Votre histoire m'a beaucoup touché... et oui, comme plusieurs, j'y ai versé une larme.

    Je ne sais pas trop quoi vous dire par contre, je ne suis pas toujours bonne avec les mots, le choix de ceux-ci. J'admire votre force et votre courage à travers tout ça.

    Je ne vie rien qui se rapproche de votre vie. Je n'ai pas d'enfant encore, mais je rêve d'en adopter. Pour le moment ça n'a pas encore fonctionner. J'ai un obstacle aussi sur ma route, j'ai un problème de santé mentale. Je n'arrive pas à être comme vous et être heureuse malgré tout... dans mon cas, il n'y a rien sur ma route et je n'arrive pas à être heureuse... j'y travaille par contre. Vous êtes vraiment une source d'inspiration.

    J'ai hâte de venir lire la suite de votre blog et les histoires de votre petite famille.

    Chantal
    www.niny1.blogspot.com

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  8. Je veux être une mère comme toi...
    Céline xx

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  9. Ophélie a de la chance d'avoir une famille aussi formidable que la vôtre.

    Vous vivez jour le jour avec votre Belle petite Ophélie.

    Moi et plusieurs autres personnes nous vivons au jour le jour au travers les pensées, les beaux comme les mauvais jours, mais surtout le courage dont vous faites tous preuves.

    Pour Ophélie c'est un conte de fée, car elle a sans aucun doute des parents merveilleux :P).

    Une chose est sûre votre Belle Ophélie vivra éternellement dans votre coeur et dans les nôtres aussi.

    Bon courage et tout plein d'amour pour vous
    Gen xx

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  10. Je ne serais pas si sévère pour la serveuse du restaurant. Elle n'était pas indifférente, elle était trop touchée pour offrir du réconfort, c'est différent. Elle a fui, c'était trop dur pour elle et elle l'a dit "je ne suis pas capable". Sa réaction n'est ni meilleure ni pire que celle d'une personne qui éclaterait en sanglots. Y en a-t-il une bonne réaction à un tel drame?

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  11. Merci d'avoir écrit vos conversations, cela va m'aider a répondre aux personnes.

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