Mon étoile

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Ophélie

mardi 16 avril 2013

Oser vivre sa vie, oser s'arrêter

Je me souviens lorsque j'ai annoncé à mon médecin qu'Ophélie est décédée, j'étais enceinte de 6 mois, Jacob avait 3 ans et des poussières et depuis 14 mois on vivait intensément chaque moment avec une volonté sincère d'être heureux malgré les embuches de la vie.  C'était beaucoup plus facile avant que après son décès.  À mon rendez-vous de suivi, ce jour-là, mon médecin m'a dit : " je ne suis pas inquiète pour toi maintenant, mais dans un an, j'ai peur que tu tombes"...c'est avec une grande gentillesse qu'elle m'a accueillie dans son bureau, 1 an et 4 mois plus tard...et c'est avec respect qu'elle m'a écoutée et convaincu de m'arrêter.  Je suis en arrêt de travail.   
Je n'ai pas envie d'entrer dans les détails, j'en suis incapable et ça n'est pas la place.  Je suis encore face à face avec le loup...face à face avec moi-même.  J'écris beaucoup, mais simplement pour moi, pour avoir une perspective non-censurée sur moi, sur ce que je ressens.  Je suis peut-être retourné trop rapidement au travail, le temps plein était peut-être trop exigeant, on a pas trouvé le bon rythme pour réussir la conciliation travail-famille-deuil, je n'arrive pas à me réadapter à la société qui semble en contradiction avec mes valeurs, je suis dans une période plus difficile de mon deuil et David a déjà été plus en forme...quoi qu'il en soit, mon corps, ma tête et mon cœur se sont alliés pour me signifier que c'était trop.  J'ai su m'arrêter avant d'arriver au mur, il s'approchait rapidement. 
Le plus difficile n'est pas d'écrire, c'est d'écrire sans se censurer soi-même.
 Le passage d'Ophélie dans ma vie a crevé un abcès dans mon cœur.  Elle a libéré toutes les émotions enfouis en moi depuis toujours, dans toutes leur intensité...et cette fois ma tête n'a pas pu les "mettre en boîte", les filtrer selon le contexte, ou les remettre à plus tard " car on a besoin de moi ailleurs".  Je ne peux que constater que je dois apprendre à les vivre et à les respecter,...que je dois apprendre à vivre et à me respecter.  Je dois vivre l'intensité de la tristesse et de la colère pour retrouver l'intensité du bonheur et du rire.  Pour retrouver ma liberté de vivre.  Je dois me regarder en face, et oser m'aimer dans ma globalité.  Je pourrai ainsi continuer à avancer, sans regarder en arrière, sans regrets, sans remords,...ainsi je pourrai vivre le moment présent et apprécier l'héritage d'Ophélie.  J'y travaille avec tout mon coeur.

Parce que j'aime mes enfants, et que j'ai envie de leur offrir une vie heureuse, avec une maman souriante et disponible.

La Vie étant ce qu'elle est, souvent incompréhensible mais toujours fascinante, elle semble s'être soudain décidée à entendre nos rêves et nos espoirs, alors que je me décide enfin à m'arrêter (elle a dut se dire : "il était temps").  Est-ce que c'est le vieil adage "aide toi et le ciel t'aidera" qui s'actualise ici?...les choses bougent et de nouvelles fenêtres s'ouvrent.  On est donc dans une période étrange, épuisé, dépressif et anxieux, et à la fois quelque part entre la terreur, le soulagement, la fébrilité, l'excitation, l'angoisse et la prudence...un peu comme sauter en parachute! 

À quelques détails prêts...c'est un peu comme ça que je me sens, mais une fois la porte de l'avion passée c'était tellement intensément agréable, je me dis que parfois il faut savoir oser vivre sa vie !